Ref BS cassette : 1475
La petite fille de Lonsieur Linh
Philippe CLAUDEL
dimanche 4 mai 2008
par bibson
2 cassettes


 
 

par Delphine Peras Lire, septembre 2005

Exil et folie sont les thèmes que Philippe Claudel aborde dans son dernier livre. Bouleversant.

On attendait avec impatience cette nouvelle livraison de Philippe Claudel, auteur consacré des Ames grises en 2003, un best-seller inattendu. Surprise : avec La petite fille de Monsieur Linh, Claudel change radicalement de registre, loin des rives de la Meuse et des échos de 14-18. Il change aussi de style, optant pour une forme épurée à l’extrême, si simple en apparence... Bonne surprise : ce nouveau roman, le sixième, se lit aussi facilement qu’il est difficile à oublier et se révèle profondément bouleversant.

De Monsieur Linh, qui débarque dans « un pays sans odeur » (la France ?) un jour de novembre au terme d’un long voyage en bateau, on sait peu de chose. Le vieil homme vient des « rivages anéantis » d’un village de rizières (au Vietnam ?), la guerre lui a ravi les siens, il porte « une valise légère » et un nouveau-né dans les bras. C’est sa « petite fille », Sang diû, son trésor, une enfant étonnamment calme, jamais une larme, prompte à s’endormir dès que son grand-père lui chante une certaine chanson. C’est pour elle que Monsieur Linh a « décidé de partir à jamais », de s’arracher à tout ce qui lui était familier et cher - sa terre natale, ses odeurs, ses traditions immuables. Installé dans un dortoir avec d’autres familles d’exilés, qui raillent volontiers ses curieuses manières, l’ « Oncle », comme on l’appelle, s’aventure finalement dans la ville hostile. Un jour, assis sur un banc, il fait la connaissance d’un certain Monsieur Bark, bonhomme replet et sympathique, très affecté par la mort de sa femme. Ces deux solitaires ne se comprennent pas mais ils sympathisent et se retrouvent régulièrement. Jusqu’à ce que Monsieur Linh et Sang diû soient transférés dans un « château » avec un « beau parc ». Une sorte d’hospice, en réalité, d’où l’ancêtre n’a pas le droit de sortir. Il s’en échappera pourtant, en pyjama, déterminé à honorer son rendez-vous avec Monsieur Bark. Au risque de se faire renverser par une voiture... Le dénouement donne alors tout son sens, terrible, à ce beau livre sur la folie d’un homme : une folie née de la perte, du déracinement, de l’exil forcé. L’abandon, la mémoire, le regard sur l’autre habitent aussi ce troublant roman. Des thèmes que Philippe Claudel explore ici avec une intensité poignante. Mine de rien.